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À la rencontre de Zoë et d’Éric

0 30 juin 2021

Zoë et Éric, deux de nos bénévoles, nous parlent de la place du GRIS dans leur vie. Éric Miram-Marthe-Rose a rejoint l’organisme en 2015 en tant qu’intervenant avant de devenir formateur, membre du conseil d’administration et de collaborer dans plusieurs comités. Il vient tout juste de déménager en Australie emportant avec lui des tonnes de souvenirs et notre éternelle reconnaissance. Zoë Birnbaum-Charbonneau est arrivée peu de temps avant le début de la pandémie. Ses débuts d’intervenante ont eu lieu en virtuel, mais la prochaine rentrée scolaire promet un possible retour en classe, ce qu’elle attend avec impatience. 

N. B. : Cette entrevue a été réalisée avant le départ d’Éric en Australie en avril dernier. 

Présentez-vous comme vous le faites en intervention ?

Éric : moi c’est Éric, j’ai 45 ans et je suis gai. J’ai fait mon coming out à l’âge de 20 ans. Dans la vie, je suis superviseur de compte pour une compagnie de location automobile. Je suis en couple depuis presque trois ans déjà avec Jean-Christophe qui était auparavant marié et père de trois enfants. Cette année nous avons un gros projet puisqu’on quitte Montréal pour l’Australie. Dans la vie de tous les jours à part travailler, ce qui me prend énormément de temps, je suis pas mal impliqué au GRIS. J’aime aller au restaurant quand je peux y aller et pour compenser le restaurant je vais au gym assez souvent. Mais pendant le confinement c’était assez compliqué ce qui fait que ça paraît pas mal !

Zoë: allo, je m’appelle Zoë j’ai 27 ans et je suis lesbienne. J’ai compris que j’étais homosexuelle il y a cinq ans à l’âge de 22 ans. Pendant les trois premières années, je l’ai caché à tout le monde autour de moi que ce soit mes parents, ma famille, mes ami.es ou même mes collègues. Personne ne le savait et j’ai vécu ça dans le secret le plus total. Aujourd’hui ce n’est plus la même situation. Je suis heureuse et très ouverte face à mon orientation sexuelle avec les gens autour de moi. Je suis en couple depuis trois ans avec une femme que j’adore et on habite ensemble depuis deux ans. On vit notre confinement et la pandémie avec notre gros chat Léo qui ne fait que dormir, mais qu’on aime beaucoup. Je travaille énormément ces temps si, mais j’adore ma job. Je travaille dans un studio multimédia montréalais. Sinon j’adore le sport, surtout le soccer. Je suis incapable de rester sur ma chaise plus d’une heure ce qui fait que je prenais souvent des pauses actives.

Qu’est-ce qui vous a poussé à devenir bénévole au GRIS ?

Éric : j’ai toujours su que je voulais faire quelque chose pour la communauté. Lorsque j’avais 14-15 ans, j’ai vécu pas mal de brimades à l’école et je me suis toujours dit que si je pouvais faire changer les perceptions et les comportements d’une façon ou d’une autre il fallait le faire à l’école. Je voulais être une sorte de rôle modèle pour une personne qui se cherche afin de lui montrer que ça va bien aller et qu’elle n’est pas seule à vivre cela. À l’époque j’avais parlé de cette envie de m’impliquer à mon psy et il a trouvé que c’était une excellente idée. Il m’a poussé à faire des démarches pour me renseigner sur le sujet avant notre prochaine rencontre. C’est comme ça qu’un matin je suis allé aux anciens bureaux du GRIS et Amélie m’a accueilli. Je suis tombé dans une période entre deux intensives, mais j’ai quand même été bénévole en participant à des kiosques et aux formations continues avant de faire mon intensive.

Zoé : le nom du GRIS était dans mon subconscient depuis plusieurs années parce que le jour où j’ai décidé de m’impliquer avec un organisme j’ai tout de suite pensé au GRIS. J’ai dû soit le voir à la fierté, soit sur internet ou dans les campagnes de sensibilisation. C’est le premier organisme à qui j’ai écrit et dans lequel je me suis retrouvée. Pour moi, adhérer au GRIS c’était vraiment sortir de ma zone de confort. Je n’ai jamais pensé que je parlerais un jour devant une classe, car c’est contre ma nature. À mon travail je suis dans un poste où c’est beaucoup d’écoute active, je conseille, je reçois les gens. Intervenir au GRIS c’est un rôle complètement nouveau pour moi, mais j’avais ce sentiment de vouloir aider et de m’impliquer dans la communauté qui était plus fort que ma peur. Je suis très fière de l’avoir fait puisque je m’y plais beaucoup et je trouve que c’est une belle plateforme pour partager un message d’espoir.

Éric, tu as intégré le GRIS en 2015, comment ton implication a-t-elle évolué depuis ?

Éric : au début de mon implication au GRIS, j’avais envie de tout voir, de tout faire. Quand je suis arrivé à ma première formation continue, j’ai rencontré deux autres bénévoles, Léa et Steve, qui m’ont parlé du comité diversité du GRIS. Je me suis lancée et j’ai commencé à aller à toutes les réunions. Par la suite, je me suis impliqué au comité communication et Mimi (agente de développement et de formation du GRIS) m’a approché il y a trois ans de cela pour me demander de devenir formateur et j’ai dit oui. Durant une fête des bénévoles, la présidente du GRIS, Catherine Duclos, est venue me voir pour m’annoncer qu’un poste au conseil d’administration était disponible et qu’on pensait à moi. Mais comme je travaillais beaucoup et que j’étais impliqué dans plusieurs autres comités, il a fallu faire un choix. J’ai décidé de laisser le comité diversité pour me concentrer sur les formations, le comité communication et le CA. Mon implication au GRIS a évolué vraiment très vite, mais je suis heureux d’avoir pu vivre toutes ces expériences.

Qu’est-ce qui t’a fait rester bénévole toutes ces années ?

Éric : pour moi le GRIS est ma famille. Ce que j’apprécie énormément quand tu vas en classe c'est de voir l’impact immédiat que notre témoignage peut avoir sur un·e ou deux élèves voir même les profs. C’est tous ces moments magiques ou un·e élève met la main sur la poitrine ou devant sa bouche parce que le témoignage le touche vraiment. On voit l’effet immédiat de nos mots et ça me nourrit parce que je sens que si on a marqué une seule personne durant toute l’intervention, alors la mission est accomplie. C’est ce que le GRIS m’apporte. Ça fait 5 ans que je suis bénévole, mais je dois quitter, car je déménage en Australie. Pour moi c’est un déchirement parce que j’aime beaucoup le GRIS et sa grande famille, mais je l’emmène avec moi dans mon cœur.

Zoë: à quand un GRIS en Australie alors ?

Éric : (rire) pourquoi pas un jour !

Qu’est-ce qui vous a marqué durant votre première intervention ?

Zoë: ma relation avec le Gris est beaucoup plus récente que celle d’Éric. J’ai fait ma formation intensive en février 2020. J’allais faire ma première intervention en assistée en mars quand la pandémie a frappé. Ma première expérience d’intervention a été en virtuelle il y a quelques mois. Je n’ai jamais fait d’interventions en classe, mais j’ai gouté à la dynamique et l’ambiance de ces dernières grâce à mon observation. C’est très particulier dans un contexte virtuel parce que j’arrive seul devant mon écran dans ma cuisine et j’ai en face une marée humaine de masque. Mais ce qui m’a marqué c’était à quel point j’arrivais quand même à établir le contact avec les jeunes. Je les sentais présents, attentifs et curieux. J’étais heureuse de réaliser que même à travers le virtuel ça se ressentait. Malgré les masques, je les ai vus, je les ai sentis et j’ai juste hâte de voir leurs expressions faciales en personne. Je pense vraiment que la mission prend tout son sens malgré la distance.

Éric : ma première intervention en classe était avec Emmanuelle. C’était mon assistée. J’étais un peu stressé, mais le respect c’est quelque chose qui a toujours été présent dans toutes mes interventions. Mon challenge à chaque intervention c’est d’arriver à aller chercher la vraie émotion et non pas seulement une écoute passive. J’essaie toujours d’avoir cette connexion vraie, c’est ce que j’aime. Contrairement à toi Zoë, moi je n’ai pas fait d’interventions en virtuelles et je me demande justement si ça aurait été pareil pour moi en virtuel. J’admire vraiment les bénévoles qui le font dans les conditions actuelles. Bravo !

Zoë: c’est un beau challenge en effet, c’est vraiment spécial !

Des appréhensions à l’idée de donner des interventions en classe Zoë ?

Zoë: honnêtement j’ai juste vraiment hâte d’y être. J’ai hâte de voir les réactions des élèves sans un écran entre nous, d’avoir les questions croustillantes en direct. J’ai envie d’être entourée de cette énergie humaine. Certes, il y’a un petit stress, mais c’est ce qui nous alimente dans notre rôle pour s’ouvrir aux autres et de parler de nous devant des jeunes qui pourraient nous juger. Mais je suis en mode prête à tout, j’ai hâte.    

Éric : les interventions en classe c’est être soit même en effet. Comme on a un temps limité en classe, il faut rapidement aller chercher cette connexion et pour ce faire il faut tout de suite entrer dans le vif du sujet. Il faut aussi savoir bien gérer les silences. Ça peut arriver que les questions tardent à arriver dans des classes. Moi j’utilise souvent l’humour. Mon gros challenge au début c’était de balayer la classe du regard pour prendre la question et y répondre. J’avais toujours du mal à fixer pendant un moment. Mais j’ai beaucoup travaillé dessus et la formation que l’on reçoit en intensive est tellement complète que n’importe quel intervenant·e qui termine son parcours de formation est prêt·e à intervenir.

Zoé : c’est intéressant ce que tu dis par rapport à la formation intensive. Je disais tantôt à quel point je sors totalement de ma zone de confort avec mon implication au GRIS. Mais je vais t’avouer qu’à chaque étape de l’intensive, même si j’avais du plaisir et que je rencontrais des gens incroyables, j’étais aussi très stressée et je remettais tout en question. Mais je me poussais à chaque fois pour passer d’une étape à l’autre. Je suis vraiment heureuse aujourd’hui de l’avoir fait parce que je suis confiante dans le processus et je n’ai plus aucune crainte. Je me sens prête et bien encadrée.

Éric : je te comprends tout à fait ! Moi ce que j’aime beaucoup dans les intensives c’est cette connexion qui se passe avec tout le monde. C’est une fin de semaine tellement intense parce que tu te mets à nus et tu partages avec ces bénévoles des choses que tu n’as pas l’habitude de dire aux gens autour de toi. Tu fais partie de la famille du GRIS très rapidement. C’est vraiment ces moments forts que l’on retient de notre formation. C’est intense comme expérience.

Zoë: vraiment ! C’est les autres qui m’ont donné le courage de continuer justement. C’est en voyant que tout le monde faisait l’effort de s’ouvrir puis de continuer de faire de son mieux que j’ai eu le courage de continuer. C’est cet esprit de gang qui le permet, je pense.  

Les bénévoles du GRIS ont une anecdote marquante d’intervention. Quelle est la vôtre ?

Zoë: j’ai eu la chance durant ma première intervention de tomber sur une enseignante incroyablement impliquée qui avait bien préparé notre arrivée et qui avait déjà discuté du sujet avec les élèves. Elle nous a énormément aidés à répondre à des questions parfois très difficiles en partageant elle-même son vécu. J’ai trouvé que cela crée un moment émouvant en renforçant la diversité des exemples durant une même intervention. Les élèves étaient encore plus intrigué·es et on voyait qu’iels avaient absorbé l’information. C’était un beau moment de partage et de solidarité.

Éric : je me souviens d’une intervention en classe de francisation à l’Université de Montréal. J’étais avec une intervenante qui était en famille homoparentale et une personne lui a fait une remarque sur le fait que les enfants ne devraient pas être impliqué·es dans des familles autre que « traditionnelles ». J’ai senti que ma co-équipière a vraiment été touchée et décontenancée par cette remarque et j’ai rebondi pour lui laisser le temps de digérer tout cela. C’est resté un moment marquant pour moi de toujours prendre soin en intervention de son auditoire de soi, mais également de son ou de sa co-intervenant.e.

Si vous aviez reçu la visite du GRIS plus jeune, qu’est-ce que vous auriez que l’on vous dise ?

Éric : que je ne suis pas seul ! Je viens de la Martinique, qui est pas mal plus religieuse et moins ouverte que la France métropolitaine ou encore Montréal et c’est cette notion de modèle qui me manquait. Je crois qu’une intervention du GRIS dans mon école m’aurait apaisé sur ce que j’étais et ce que je suis.

Zoë: si j’avais eu des modèles qui me ressemblaient, je crois vraiment que j’aurais accepté mon homosexualité beaucoup plutôt et je me serais probablement évité de la souffrance et de l’isolement. Ma souffrance venait du fait que je pensais que c’était un échec d’être lesbienne, que j’allais décevoir, que j’allais être rejeté. Je croyais que ce n’était pas « normal » et personne ne m’avait dit qu’il y avait d’autres personnes comme moi et que c’est correct. Tout simplement se faire dire ça aurait été un baume incroyable. Alors mon message pour les jeunes c’est soyez indulgent.es et bienveillant.es envers vous-même.

L’avenir du GRIS pour vous ce serait ?

Éric : l’avenir du GRIS je le vois pluriel. Encore plus inclusif et diversifié avec différents modes d’interventions. J’imagine l’avenir du GRIS réactif, ouvert et bienveillant.

Zoë: je souhaite au GRIS de continuer à être un leader dans son rayonnement parce que je pense qu’il est déjà bien placé dans la tête des gens. Comme l’a dit Éric, je pense que la diversification de l’offre peut être intéressante parce qu’il y’a mille et une façons d’aller chercher les gens. Que ce soit par les interventions ou la promotion par les médias sociaux ou encore la vidéo. Pourquoi ne pas aller carrément faire des interventions dans d’autres provinces ou pays tels que l’Australie ? Ce n’est pas fou de penser que la prochaine étape serait un GRIS mondial.

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